Archive for juin 2010
Une France irréelle
Malgré l'empilement des livres chez moi, il m'arrive souvent de relire, notamment dans les transports. J'ai du lire 3 fois ce bouquin en 20 ans, mais je lui trouve toujours autant d'intérêt, parce que c'est une vision de 1957 sur une France non ouverte à l'extérieur qui est toujours d'actualité.Emmanuel Berl, ancien combattant de 1914, devint nègre de Pétain au début du régime de Vichy, et trouva la formule fameuse "la terre ne ment pas". Il faut aussi le mari de Mireille, du petit conservatoire.Je lui trouve un style clair et qui cogne, mais on ne trouve pas, à ma connaissance, ses ouvrages en poche. Ils mériteraient d'être réédités.
Pourquoi la question des retraites est un point clef
Talentueux JF Kahn, qui parvient en une seule phrase à exprimer ce que je voulais dire.
"A cet égard, la réunion organisée le 1er juin à Paris sur la question des retraites, par Marianne et le CRREA, fut significative. Finalement, un seul consensus s’est dégagé : l’impossibilité de trouver une solution pérenne qui ne s’intégrerait pas à une recomposition globale du système politico-social tout entier."
Pourquoi Evra n’a pu s’expliquer .
Parce que si l'on écoute ce qui est rapporté par les uns et les autres sur les divisions de l'équipe de France, on a :
-un conflit entre noirs et blancs
-entre arabes et noirs
-entre provinciaux et banlieusards
-entre jeunes et vieux
-entre musulmans et non-musulmans
-entre antilllais et africains
-entre joueurs évoluant à l'étranger et en France
En fait, il y aurait à croire les commentateurs plus de divisions que de joueurs. Ce dans quoi Evra ne pouvait pas rentrer..
Les plus de 35 ans pensent que cela reflète la société, les moins de 35 ans que ce n'est que du football. Je ne peux m'empêcher de penser que cela reflète les valeurs diffusées par les medias, un problème systèmique, mais j'ai plus de 35 ans.
Un extrait de Courteline pour vous amuser
"Bourré de grec, bourré de latin, bourré d’anglais et d’allemand,
ex-élève sorti premier de l’École des Langues Orientales,
et absolument incapable, avec ça, de mettre sur leurs pieds vingt
lignes de français, Théodore Van der Hogen évoquait l’idée
d’une insatiable éponge de laquelle rien n’eût rejailli."
Je ne manifeste pas pour la retraite en fait
car une réforme serait acceptable si elle ne se faisait pas sous la pression des seuls milieux financiers, dans une France qui a perdu la maitrise de son destin. Le gouvernement n'a pas su gouverner au centre, et respecter une société équitable. Il n'a su que faire des cadeaux fiscaux, et venir au secours des banques. Je me sens floué d'avoir du venir au secours des spéculateurs. C'est la dernière manifestation qui pourra encore avoir un poids sur le cours de choses, ensuite il sera trop tard, et nous descendrons vers l'abime. La marionnette que nous avons élu aura joué son rôle, et l'on pourra se passer de lui, le vrai but du jeu étant géré par d'autres, moins sujet à risque.
C'est notre dernière possibilité de nous exprimer, voici pourquoi ce sera ma première grève en 30 ans, et une de mes rares apparitions en manifestation. La maison brûle, la Cour des comptes nous explique en termes discrets ce qui va très mal dans ce pays.
J'éprouve un très gros malaise avec ce gouvernement, il me semble tellement hors sol. Krugman explique que les riches sont devenus si riches aux USA, qu'ils ont même pu s'acheter un parti, le parti républicains. Je crois que nous sommes dans cette situation aujourd'hui.
Brighelli nous donne un scoop
Au détour du blog de Brighelli, on a une explication. Voici d'où vient la fracture sociale à l'intérieur de l'équipe de france : parmi toutes ces racailles défiscalisées par Sarko, se trouve un gaulliste cultivé :
"Un garçon issu d’un autre milieu, dont le père fut prof de maths avant d’être entraîneur. Qui sort avec la fille de Villepin, au lieu de se taper une radasse décolorée — Ribéry serait-il du genre à croire qu’une pipe est meilleure en diamants qu’en bruyère ? Bref, Yohann Gourcuff ne se contente pas d’avoir une belle gueule et de bien jouer : il parle français. Performance inexcusable, apprend-on de diverses sources (3). Déjà, il y a deux mois, Natacha Polony racontait sur son blog ce qui arrive aux bons élèves — pardon : je voulais dire : aux sales intellos (4). Le quotidien des collèges s’est étalé sur les stades du Mondial. Le monde entier en rigole encore. Le pays des droits de l’homme est devenu celui du droit des voyous."
La France selon le grand Nicolas
« Le Français, il cache ce qu'il a. Même s'il pouvait montrer plus, il cacherait. Moi, ce n'est pas ma mentalité. Non pas que je cherche à me montrer. Mais quand tu es joueur de foot, que tu as rêvé de t'acheter une belle voiture, une belle maison, tu le fais. »
Anelka, qui « aimerait bien habiter en France », juge que ce n'est « pas possible » :
« On sait pourquoi, niveau fiscalité. […] Je ne veux pas jouer au foot et payer aux impôts 50% de ce que je gagne. L'argent que j'ai, il est pour mes enfants. Si je peux leur offrir quelque chose, je le ferai là où il n'y a pas de fiscalité […]. Si certains sont choqués tant pis. Mais la France, c'est un pays hypocrite. »
Anelka a dû rater l'épisode du bouclier fiscal, mais passons.
Un article prémonitoire de Laurent Mauduit en 2005
analyse
Dans le cas de la droite, toutes sensibilités confondues, on devine sans peine pourquoi elle est taboue : les baisses d'impôts constituent la pierre angulaire de sa politique économique. Qui ne connaît le raisonnement ? L'Etat dépense trop ; il faut donc réduire son train de vie ; ce qui permettra de redonner du pouvoir d'achat aux Français en allégeant leurs prélèvements, et de stimuler ainsi le dynamisme et la compétitivité de l'économie.
Quant à la gauche, elle critique les nouvelles baisses d'impôts annoncées par Dominique de Villepin, mais plus à cause des modalités retenues – qui avantagent les hauts revenus – que pour une question de principe. Car, sur le fond, les socialistes défendent depuis longtemps un cocktail budgétaire similaire – même si le dosage peut être différent – , associant réduction des dépenses de l'Etat et baisse des impôts. Pourtant, à y regarder de plus près, on comprend vite que ce consensus perd de plus en plus de sa pertinence et que le moment est venu sinon de le remettre en question, du moins d'en débattre. Sauf à accepter que la politique budgétaire s'englue dans une impasse.
Première interrogation provocatrice, mais dont il devient difficile de faire l'économie : est-il ainsi exact que l'Etat dépense toujours davantage et qu'il est prioritaire de le mettre à la diète ?
On connaît la réponse, la plus souvent assénée dans les débats publics : évidemment oui, l'Etat fait, si l'on peut dire, du "gras" puisque la dépense publique est passée de 44,7 % du produit intérieur brut (PIB), en 1978, à 54,7 %, en 2003. N'est-ce donc pas l'indice incontestable d'un Etat devenu obèse, puisqu'il absorbe plus de la moitié des richesses produites.
Et pourtant, non ! Car si les dépenses publiques augmentent effectivement, c'est sous le coup de l'envolée de celles liées à la protection sociale (de 18,9 % du PIB à 25,2 % au cours de la même période). Si l'on s'en tient aux seules dépenses de l'Etat, il n'y a aucune progression. Atteignant 22,1 % du PIB en 1978, les dépenses de l'Etat sont restées quasi étales les vingt-cinq ans suivants, pour se situer à 22,8 % en 2003.
On peut donc défendre le modèle social français et faire valoir que le vieillissement démographique et l'amélioration des techniques médicales justifient qu'il coûte de plus en plus cher. Ou alors, on peut s'inquiéter de cette dérive et plaider pour des réformes énergiques. Mais il faut, dans tous les cas, admettre que c'est là un autre débat. Et que les dépenses strictement engagées par l'Etat ne sont pas en cause. On observe d'ailleurs que la plupart des grands pays de l'OCDE ont des taux de dépenses de l'Etat assez voisins de la France, autour de cette barre de 22 % du PIB.
Deuxième série de questions, impossibles à éluder : pendant combien de temps sera-t-il encore possible de baisser les impôts ? Y a-t-il une limite à ne pas dépasser – sauf à prendre le risque de mettre en cause certaines des missions de l'Etat ? Personne n'ose aborder le débat de front. Il est pourtant décisif.
Car depuis deux décennies, chaque gouvernement y a été de ses baisses d'impôt. De1986 à aujourd'hui, tous les prélèvements ont été réduits. De la TVA à l'impôt sur le revenu en passant par la fiscalité de l'épargne, les taxes d'habitation et professionnelle ou l'impôt sur les sociétés, les plans d'allégement se sont succédé à marche forcée. Et s'il y a eu un impôt nouveau, l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), rétabli en 1988, pour le reste, la France n'a connu qu'une rafale de baisses.
Dans les débats publics, cette réalité est, certes, tout autant contestée. Le plus souvent, un seul chiffre est évoqué : celui qui atteste de l'envolée des prélèvements obligatoires. Qui ne connaît la tendance, rappelée à l'envi ? De 35,1 % du PIB en 1970, ces prélèvements sont progressivement passés à 43,8 % en 2003. Preuve irréfutable que l'Etat prélèverait toujours plus, pour dépenser aussi… toujours plus ! Là encore, la démonstration est entachée de mauvaise foi. Sur la période considérée, ce sont les prélèvements sociaux (CSG comprise à partir de 1991) qui ont progressé (de 13,1 % du PIB à 21,8 %), expliquant la dérive des ponctions obligatoires. Mais si l'on s'en tient au seul périmètre de l'Etat, le constat est inversé : le poids des prélèvements s'est très nettement allégé à cause des mesures de transferts, liés à la décentralisation. Mais aussi à cause, précisément, de la politique continue de baisse des impôts.
A preuve, la part des prélèvements de l'Etat a, ainsi, chuté de 18,4 % du PIB en 1970 à 15,6 % en 2003. Soit une baisse spectaculaire équivalente à 2,8 points de PIB. Sur la même période, le poids de la TVA a ainsi été allégé d'un montant équivalent à 1,7 point de PIB et l'impôt sur le revenu de 0,3 point (et même de 1,3 point si l'on prend non plus 1970 mais 1981 pour année de référence).
Cette diminution de 2,8 points de PIB des prélèvements d'Etat laisse perplexe. A-t-on relevé que ce chiffre colossal, qui équivaut à plus de 43 milliards d'euros, est voisin du déficit que l'Etat a enregistré cette même année 2003, soit 2,9 % du PIB. Il ne s'agit pas d'en conclure que sans les baisses d'impôts décidées au cours des deux dernières décennies, le budget de l'Etat serait aujourd'hui à l'équilibre. Le raisonnement serait absurde : dans une économie mondialisée, la France ne pouvait pas se tenir à l'écart de la vague du "moins d'Etat" et du "moins d'impôt" qui a commencé à déferler dans le courant des années 1980, sauf à perdre, comme on dit maintenant, de son "attractivité".
La similitude des deux chiffres incite, tout de même, à se poser une cascade de questions : la France peut-elle encore longtemps continuer à conduire à crédit une politique de baisse des impôts ? L'interrogation concerne au premier chef Dominique de Villepin qui a choisi d'annoncer une nouvelle réforme de l'impôt sur le revenu pour 2007, sans révéler, dans le même temps, les conditions de son financement. Ce qui laisse à penser que ces cadeaux fiscaux alourdiront encore un peu plus les déficits de l'Etat, et en bout de course, la dette.
Autre interrogation, plus profonde celle-là : après deux décennies de baisse des impôts (parfois sur fond de populisme antifiscal), la gauche et la droite ne devront-elles pas se préparer à un combat autrement plus difficile : recommencer à défendre auprès de l'opinion la fonction citoyenne de l'impôt ?
En tout cas, la politique budgétaire française semble arriver à un tournant de son histoire. Longtemps, Jacques Chirac a pu populariser la fameuse équation de l'économiste américain Arthur Laffer, en usant du slogan : "Trop d'impôt tue l'impôt." Mais aujourd'hui, l'équation est en train de s'inverser ; et c'est un nouveau slogan qu'il faudrait inventer : "Trop de baisse d'impôt tue l'impôt" ….. et creuse le déficit.
Mais comme cette évidence n'est pas bonne à dire, le ministère des finances use de stratagèmes dont il a le secret, en affichant un budget pour 2006 dont la sincérité est douteuse, adossé à des prévisions de déficits publics très nettement enjolivées…
La Cour des comptes : un conseil subtil
La Cour des comptes s'alarme de la situation financière française, et surtout elle glisse cette remarque importante qui est le point d'articulation de son rapport et son analyse clef :
"Il est nécessaire d’atteindre ce résultat par les mesures de hausse des prélèvements et de baisse des dépenses qui correspondent à un véritable effort structurel”, avance-t-elle. Elle souligne toutefois que, “compte tenu de l’urgence, c’est sur les recettes qu’il ne faut pas hésiter à jouer dès à présent”, car “il est plus difficile d’infléchir rapidement la courbe des dépenses”.
Comme avec Reagan, les problèmes viennent de l'insuffisance de recettes, pour utiliser un doux euphémisme. On a développé l'embusquement fiscal dans un pays en difficulté. Sarko paie son bouclier fiscal qui devient sans jeu de mots l'obstacle à toute résolution des difficultés françaises. Il est impossible de faire peser sur les français un effort mal partagé, dans un contexte bling bling d'augmentation des inégalités.
Curieusement, le Figaro n'a pas noté ce point fondamental du rapport, peut-être aurait-il besoin d'un bon connaisseur du style de la Cour des comptes ?
Il faut noter que Lambert, l'autre comparse de Migaud qui dirige la Cour des comptes, mais à l'UMP, est furieux contre Sarkozy.
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