triton95

un regard sur le monde

Qui est responsable de la situation financière de la ville d’Argenteuil ?

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Depuis que j’habite Argenteuil, le débat sur l’origine de la dette de la ville, et de l’augmentation des impôts est un serpent de mer que tout le monde se renvoie, et qui est maintes fois utilisé dans les tracts électoraux. J’ai lu cet article avant les élections de 2008, et il relativise bien les choses.

« sur le site du modem, on trouvait avant les élections municipales cet article, qui confirme que la hausse des impôts était inéluctable avant l’arrivée de Doucet, ce que le chef de cabinet de M Mothron reconnaissait. Mon intervention ne se moque donc de personne, simplement je n’ai pas de fil à la patte, et je peux ainsi faire la part des choses.

« J’évoque alors les risques de financement du budget d’investissement que j’ai pu observer à la lecture du Compte Administratif 2006.
Selon moi, le Compte Administratif fait apparaître des marges de manœuvres dégagées sur le budget de fonctionnement, marges menacées à terme par une croissance annuelle de 2 % (et 4,4 % pour les charges de personnel) des dépenses de fonctionnement, ces marges sont utilisées plus massivement chaque année (8 millions transférés en 2005, 15 millions transférés en 2006) pour sauvegarder, de plus en plus difficilement, l’équilibre du budget d’investissement.
On sent poindre une hausse d’impôts devenant de plus en plus inéluctable, alors que nos taux d’imposition se situent déjà à des niveaux records (pratiquement le double de la moyenne de la région).
Je fais part à Jean de Saint Sernin de ma préoccupation. Sa réponse est la suivante : « si cela ne tenait qu’à moi, les taux d’imposition augmenteraient chaque année du montant de l’inflation » (ce qui les placerait aujourd’hui autour de 22 %).
Il me répond également que les investissements ont été assumés sans que la dette ne bouge. Je lui rappelle que cette dette se situait à 183 millions d’Euros en 2001 (Georges Mothron déclarait ce chiffre en octobre 2001 et rappelait qu’Argenteuil était la troisième ville la plus endettée de France dans sa catégorie), et se situe aujourd’hui à un peu plus de 200 millions d’Euros. « Oui, bon, elle a peu bougé, à quelques millions près » me répond Jean de Saint Sernin (sic). Il me rappelle « qu’Argenteuil est une ville pauvre, et que peu de ménages payent des impôts » (environ la moitié)
Je lui rappelle de mon côté que le taux de la taxe d’assainissement, lui, est en augmentation régulière année après année, qu’Argenteuil a besoin d’entreprises, mais que le produit de la taxe professionnelle est attribué à la CAAB (Communauté d’Agglomération Argenteuil Bezons), et que dans le compte administratif de la ville, seuls sont visibles de petits ajustements entre la CAAB et la ville. « c’est le même bassin d’emplois » argumente Jean de Saint Sernin. » »

Il est bien difficile de s’y retrouver : la droite a endetté la ville, en s’engageant sur des emprunts à effet retardé. Le successeur ne peut passer son mandat à réduire la dette du précédent, sans prendre d’initiatives. Il aurait eu à la fois l’effet négatif des augmentations d’impôts inéluctables et héritées, et l’absence de projet et n’aurait rien laissé dans son bilan. Il a donc préféré lancer des constructions, et un peu d’endettement plutôt qu’une inexistence de toute façon coûteuse pour les classes sociales sur lesquelles s’appuient la fiscalité argenteuillaise. C’est un peu le dilemme, le maire élu hérite des dettes, et personne n’a intérêt à réduire son action politique à la réduire pour redonner des marges à un successeur, sans pouvoir apposer sa marque sur la ville. Doucet a critiqué le figuier blanc comme un éléphant blanc, mais il en a construit aussi pour rester dans l’histoire et disposer d’un bilan. Les candidats bénéficient de leurs projets, leurs successeurs de leurs dettes. Pauvre Mothron qui n’a pu inaugurer le figuier blanc, comme Giscard avec le TGV.

Argenteuil est une ville clivée, une sorte d’Italie du nord des collines pavillonnaires face au sud du val des HLM, où la moitié de la ville paie pour l’autre moitié, et seuls les payeurs sont vraiment participatifs aux élections. L’ancien maire avait même organisé une sorte de « révolte fiscale », qu’il estime son meilleur argument, même s’il ne pouvait changer radicalement de politique autrement que dans les discours, et si d’une certaine manière, la preuve de sa prudence sociale réside dans cette preuve a contrario qu’il n’y a pas eu d’émeutes en 2005 dans la ville. C’est à mettre paradoxalement à son crédit.

Comme la gare de Perpignan pour Salvador Dali, Argenteuil est un peu notre centre du monde, un laboratoire social extraordinaire, plus intéressant à étudier qu’une ville morne et surannée de la banlieue aisée.

Written by Le blog de Jean Trito

18 avril 2012 à 04:14

3 Réponses

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  1. Une analyse intéressante (et encore d’actualité) qui met en lumière le comportement de certains de nos politiciens (des 2 côtés de l’Atlantique).

    longeyesamurai

    18 avril 2012 at 10:56

    • merci pour cet avis très distancié par rapport aux contingences bien locales et les affrontements picrocholins !

      Le blog de Jean Trito

      18 avril 2012 at 11:11

      • Et bien voilà que je viens d’apprendre un nouveau mot qui résume les actions de beaucoup de politiciens!

        longeyesamurai

        20 avril 2012 at 16:25


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